
Société : « Accélérez ou mourrez ! »
La Philosophie Libertarienne
Alors que Paris a accueilli pendant près d’une semaine le Sommet International de l’IA sous la nef du Grand Palais, rassemblant 1 500 participants triés sur le volet, chefs d’États et patrons de la tech, quels sont les enjeux réels liés à l’avènement des supers IA (ASI ou AGI) sur les populations du monde ?
Par Estelle GUEÏ
Le grand remplacement de l’homme par la machine. Mythe ou réalité ?
Depuis le lancement des logiciels d’IA génératives, telles qu’OpenAI, DeepSeek, Midjourney, ElevenLabs ou encore Runway, les prompts remplacent progressivement la créativité humaine.
Si pour le moment les effets de l’utilisation des IA génératives ne se font pas encore ressentir collectivement, le FMI pronostique que 40 % des emplois dans le monde seront exposés à des transformations à cause des progrès des IA. Certains métiers seront plus affectés que d’autres. Par exemple, les métiers créatifs sont déjà touchés par les conséquences de l’utilisation massive de l’IA.
Comment lutter contre les faibles coûts de création/production d’une image, d’un texte, d’une vidéo, d’un son, d’une traduction, générés en moins de 10 secondes ?
Par conséquent de nombreux illustrateurs, photographes, auteurs, scénaristes, graphistes, journalistes et traducteurs auraient déjà perdus des contrats…Une situation ubuesque étant donné que les IA sont entraînées à partir de médias créés par des humains !
Pour le moment, aucun accord n’a été demandé aux éditeurs, ni aucun paiement ou droits d’auteurs n’ont été versés aux créateurs. Ce qui constitue un pillage massif international de propriétés intellectuelles en toute impunité !

La Writers Guild of America, le syndicat qui avait initié la seconde grève de scénaristes la plus importante de l’histoire d’Hollywood, a passé un accord de principe avec les studios et les plateformes pour autoriser l’usage de l’IA générative et de mieux rémunérer les auteurs.
Le libre arbitre : le pré carré de l’homme ou un champ de bataille ouvert aux IA ?
Si pour le moment les IA ne sont pas encore conscientes de leur propre existence, ne possèdent pas de libre arbitre, et ne peuvent ressentir d’émotions comme un être humain, cependant, le fondateur de Microsoft, Bill GATES, compare l’arrivée de l’IA dans nos vies à la révolution provoquée par la création des ordinateurs. Idem pour le patron de Google, Subdar PICHAI qui voit en cette puissante technologie une découverte encore « plus marquante que le feu ou l’électricité !

Bill GATES, compare l’arrivée de l’IA dans nos vies à la révolution provoquée par la création des ordinateurs.
Bien entendu, l’IA n’a pas que des avantages créatifs, puisque grâce à sa puissance de calculs, d’analyse des données et de synthèses, son application dans le milieu médical frise le miracle et sauve des vies.
Par exemple, en radiothérapie, pour localiser une tumeur et la traiter au bon endroit cela « pouvait prendre deux à trois heures, voire une demi-journée dans les cas complexes ». Désormais, grâce aux logiciels de deep learning le travail est réalisé en deux ou trois minutes comme l’explique le professeur Jean-Emmanuel BIBAULT (source France Info-juillet 2023).
L’IA dans le domaine de la santé offre des opportunités pour identifier les cancers les plus retors et donc de livrer aux chirurgiens des diagnostics plus rapides.
« On devrait arrêter de former des radiologues maintenant. Il est tout à fait évident que dans cinq ans, le “deep learning” fera mieux que les radiologues. » Sentence prononcée en 2016 par l’informaticien, Geoffrey Hinton, co-récipiendaire du prestigieux Prix Turing 2018 pour ses travaux sur les réseaux de neurones.
Cependant, si l’IA et l’automatisation des tâches dites « potentiellement fastidieuses », comme écrire des mails, rédiger des notes de synthèse, peindre un tableau, écrire un livre, prendre des photos, laisserait plus de temps pour la réflexion et les tâches créatives, qu’en est-il de la notion de plaisir ? D’utilité sociale ? d’accomplissement personnel/professionnel, de quête d’excellence et d’épanouissement individuel ? D’identité artistique ? De gymnastique du cerveau ?

L’objectif du Sommet de l’IA est de renforcer l’action internationale en faveur d’une intelligence artificielle au service de l’intérêt général.
Car dans une société où les valeurs sont inversées, et où la méritocratie peine à exister, ériger l’IA comme un modèle de société (ou un idéal) conduirait l’humanité vers quel type de civilisation pour les générations à venir et pour nous-mêmes ?
Nous n’évoquons pas en outre, bien entendu, les aspects économiques, fractures numériques, santé mentale, que la révolution IA provoquera irrémédiablement dans moins d’une décennie, auprès de certaines couches de la population mondiale peut-être plus fragile.
Gageons que le prochain sommet de l’IA qui devrait avoir lieu en Inde, renforcera réellement l’action internationale en faveur d’une intelligence artificielle au service de l’intérêt général.
Vaste débat philosophique…et technologique !