Les Sept Maris d’Evelyn Hugo

Un roman néo-féministe à l’ère Hollywoodienne

Belle, riche, puissante, séduisante et dotée d’un charme irrésistible, l’actrice Evelyn Hugo a fait chavirer les têtes de toute l’Amérique ! Mais qui se cache réellement derrière cette femme complexe, à la fois calculatrice et humble, au destin hors-norme, qui convoque une jeune journaliste inconnue, Monique Grant, pour recueillir ses confidences ? Un best-seller intense à (re)découvrir !

Par Estelle GUEÏ

 

 

Un phénomène BookTok

Attention, ce livre provoque un véritable uppercut et une addiction ! Présenté comme « Le phénomène TikTok »,le livre de Taylor JENKINS REID, Les sept maris d’Evelyn Hugo, nous happe dans une histoire envoûtante, aux Etats-Unis, dans le Hollywood des années 60’s. Evelyn Diaz, alias Evelyn Hugo, une jeune fille d’origine cubaine, rêve de faire carrière dans le cinéma. En mode, «Lance-toi, sois gentille, et saisis à deux mains ce que tu veux de ce monde », on assiste à la naissance et à la fabrication d’un pur produit des studios d’Hollywood.

 

 

Encensé par les magazines Elle, Vogue et Glamour comme un « best-seller international culte», Les sept maris d’Evelyn Hugo est un véritable objet littéraire non identifié, écrit comme une série Netflix.

Les personnages extrêmement vivants et attachants semblent pouvoir s’échapper à tout moment du roman, pour apparaître dans la vraie vie ou sur nos écrans. Au fil des pages, on imagine que certaines descriptions et situations pourraient être transposées à des stars d’aujourd’hui ou d’hier, comme l’ex couple phare les Brangelina, Tom Cruise, DiCaprio, Zendaya, Marilyn Monroe ou encore Elizabeth Taylor et Tim Burton.

 

 

L’art du suspense et de la narration sont maîtrisés avec brio, par l’auteure qui privilégie la technique du récit croisé, pour raconter l’histoire de cette légende du cinéma, Evelyn Hugo. L’actrice revenant sur sa carrière et sur ses choix de vie, se confie au micro d’une jeune journaliste inconnue, Monique Grant, du journal Vivant. Les dialogues entre les deux protagonistes sont émaillés d’extraits de coupures de presse peoples de l’époque témoignant des frasques d’Evelyn. Dans le même temps, on suit le lien qui se tisse entre la journaliste Monique, qui se déplace pendant plusieurs jours chez Evelyn Hugo pour recueillir ses confidences, et son évolution psychologique. Le lecteur est ainsi témoin de l’introspection opérée par Monique à l’écoute de certains récits vécus par Evelyn, à une autre époque, et qui lui font écho personnellement et professionnellement. Par ricochet, nous sommes aussi entraînés dans ces jeux de miroirs…

Cependant quelques zones d’ombres subsistent : pourquoi une légende du cinéma préfère-t-elle se confier à une journaliste inconnue plutôt qu’à une confirmée ? Parmi ces 7 époux, lequel Evelyn Hugo a-t-elle réellement aimé ? Quels lourds secrets renferment sa personnalité énigmatique ?

 

 

Le combat des LGBTQ+

Dans une Amérique puritaine, en proie aux révolutions culturelles et aux guerres (la crise de Cuba, les émeutes de Stonewall, les droits civiques des afro-américains…) on suit la vie sulfureuse et mystérieuse d’Evelyn Hugo, ponctuée de scandales, de mariages glamours immortalisés sur papier glacé, de films oscarisés et de drames. Au fil des confidences, on découvre que le portrait de l’icône du glamour et de l’élégance, au « généreux décolleté et à la taille fine », est bien plus contrasté, plus complexe qu’un fabuleux visage et corps. Evelyn Hugo fait certes tourner les têtes des producteurs, acteurs et autres figures de la gent masculine qui croisent son chemin vers l’ascension, mais de qui est-elle réellement amoureuse ? Qu’est-ce qui l’anime ?

Lorsqu’elle rencontra une autre nouvelle étoile montante du 7^ème la vie d’Evelyn Hugo basculera…

 

Parmi ses 7 maris, qui a fait réellement battre le coeur de l’actrice Evelyn Hugo ?

 

L’histoire d’amour entre ces deux stars de cinéma est totalement émouvante d’autant plus qu’on ne s’y attend pas. On se rend compte des difficultés qu’ont traversé les couples gays aux États-Unis jusqu’au XXème siècle, où il était impossible de vivre au grand jour leur histoire d’amour sans être discriminés. Ils vivaient « in the closet » (dans le placard) par peur d’être répudié(e)s par la société, de perdre leurs emplois, dans les cas les plus extrêmes, certains étaient enfermés ou leurs enfants placés. Dans les années 60’s, aux USA, être gay ou bisexuel(lle) était passible de poursuites judiciaires. A la lecture de ce livre, on mesure le chemin parcouru par la communauté LGBTQ+ pour faire valoir leurs droits et cesser de jouer la mascarade pour enfin être heureux. N’oublions pas que ce fut seulement en 2003 que l’homosexualité fut dépénalisée aux États-Unis.

Ce livre nous enseigne donc la tolérance, l’amour de soi et la quête de transparence pour être plus heureux(se) et aligné(e).

L’auteure, Taylor JENKINS REID, originaire de Los Angeles, a travaillé dans la production cinématographique avant de se consacrer à l’écriture.  Ainsi, elle décrit à la perfection un environnement qu’elle connaît. Elle révèle ainsi que les décors du 7^ème art sont pavés de mariages bidons, d’amitiés en cartons, de sacrifices, que le corps peut se révéler une « monnaie d’échange », où pour réussir 2 qualités sont nécessaires : « Il faut de la chance et être un fils de pute». 

 

 

Résonnant comme un combat néo-féministe, JENKINS REID aborde de nombreux thèmes de société très douloureux et tabous comme l’homosexualité féminine, le coming-out, le suicide par assistance médicale pour le droit de mourir dans la dignité, le cancer du sein, les droits civiques, le métissage, la condition de la femme, les violences faites aux femmes ou encore le patriarcat.

Les sept maris d’Evelyn Hugo est un roman qui distille des conseils aux femmes pour les inciter à prendre leur destin en mains, à avoir confiance en elles et à forger leur propre valeur. 

En refermant la dernière page, après avoir reniflé, pleuré ou retrouvé une certaine forme d’impulsion, on ne peut s’empêcher de se remémorer le conseil d’Evelyn Hugo : « Ne permettez jamais à quiconque de vous faire sentir ordinaire » !